samedi 20 octobre 2012

Un lieu dédié aux cultures urbaines ?

Rencontres très riches au café citoyen sur les cultures urbaines : quelle place pour le hip-hop dans la politique culturelle ? Faut-il un nouveau lieu d'expression à Rennes ? Comment se passe le dialogue entre acteurs et institutions ?

Son argumentation est pondérée et bien construite, mais Pierre-Marie Boisseau est un vrai passionné. En façade, il apaise, il écoute. Intérieurement, il bouillonne.

Au milieu, René Jouquand, adjoint à la Culture
Après un bref rappel historique (ces cultures viennent des ghettos noirs américains, le hip-hop n'est pas seulement de la musique mais aussi du graff, de la danse, des sports, des codes vestimentaires...), le membre de l'association Dooinit a plaidé pour une meilleure reconnaissance de cette culture, sa culture.

Premier constat, la diffusion des cultures urbaines est trop cantonnée aux MJC. Plus globalement, elles sont souvent rattachées au secteur jeunesse « alors que les gens qui ont fait vivre ces pratiques ont maintenant plus de 40 ans. » Le graff, le chant ou la danse sont certes des expressions « spontanées » (le mot est revenu souvent), c'est à dire peu organisées, mais un certain nombre d'artistes aimeraient pouvoir se professionnaliser. Première chose donc : à quand la fin de l'étiquette « jeunes » ?

Du graff dans des lieux d'expo ? « Pourquoi pas ? »

L'autre question, typique des sujets dont aiment débattre les acteurs culturels : parle-t-on d'une culture ou d'un mouvement culturel ? « On entendait souvent, dans les années 80 et 90 : 'c'est une mode, ça passera'. Mais non, c'est une culture à part entière », s'anime Pierre-Marie. Un salarié du Triangle avoue une méconnaissance globale des métiers de la culture envers le hip-hop. Pierre-Marie renchérit : « Pourquoi ne pas inviter des graffeurs à la Biennale d'art contemporain ? »

A droite, Pierre-Marie Boisseau, de Dooinit
Vient ensuite l'idée forte : faut-il créer un lieu dédié à cette culture ? Oui, répondent les acteurs. « Ca ne coûterait pas cher », avance un participant, citant l'exemple de la Maison du hip-hop à Lille. Le rock, les musiques électroniques, la danse contemporaine, toutes ces disciplines ont des lieux pour exister à Rennes. « La difficulté est que les cultures urbaines sont pluridisciplinaires, répond René Jouquand, adjoint au maire à la culture. Le système français est très segmenté et centré sur les disciplines. »

En clair, comment réunir en un seul lieu toutes ces expressions ?

« A Rennes, on a des champions du monde de DJ, de danse. Mais ils ne sont pas valorisés. Où peuvent-ils s'exprimer ? Aujourd'hui les acteurs des cultures urbaines sont fatigués de porter tous ces besoins à bout de bras. » Il estime qu'un lieu spécialisé hip-hop pourrait tout autant remonter dans le temps et faire découvrir du jazz, du blues et toutes les sources des cultures urbaines ; mais aussi s'ouvrir à d'autres expressions, créer des passerelles.

« Il n'y aura pas de deuxième centre culturel au Blosne », répond René Jouquand. Ses réactions sont autant de conseils donnés aux acteurs locaux : d'une part, le Triangle doit faire de la place aux cultures urbaines, peut-être davantage. D'autre part les acteurs doivent se structurer, prouver qu'ils sont capable de se projeter dans la durée. « Le hip-hop existe depuis 30 ans, rétorque Pierre-Marie. 30 années dans un sas d'attente, ça fait beaucoup. »

CR

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire